Les Mimistoires : visiter Potosi dans l’antre des mines d’argent du Cerro Rico
Après 4 jours lunaires dans le Salar d’Uyuni, on part visiter Potosi et surtout en apprendre plus sur ses mines d’argent et la vie quotidienne des habitants. Une des expériences les plus fortes de notre voyage en Bolivie, nous sommes vraiment heureux de vous raconter l’histoire des hommes et des femmes qui vivent ici. On ne va pas se mentir, c’est une expérience qui nous a chamboulée. Mais ne voyage-t-on pas pour découvrir l’Autre plus profondément ?
Embarquez avec nous pour une plongée dans l’une des mines les plus profondes du monde.
Cet article peut contenir des liens affiliés. Quand vous réservez un hôtel, un restaurant ou une activité via ce lien, nous touchons une petite commission de la part de l’annonceur, sans frais supplémentaires de votre côté 🙂.
⛪ Visiter Potosi : souvent juste une étape et pourtant..
Ni d’une ni de deux, nous nous jetons dans 4 heures de bus pour la ville de Potosi directement après être descendus du 4×4 de notre expédition dans le Salar de Uyuni. Une chose est sûre, les péripéties ne prennent pas de vacances.
Potosi city
Visiter Potosi n’est ni glamour, ni très touristique. Nous débarquons du vieux terminal étouffés par les klaxons de taxis immobilisés dans les bouchons de l’avenue. Fin d’après-midi, heure de pointe, tour des hostels du centre-ville.
Nous sommes avec Marion et Edouard, un couple français avec qui nous avons parcouru un sacré bout de la Bolivie. Notre stratégie ? 2 personnes restent en attente avec les sacs, pendant que les 2 autres vont toquer à la porte des auberges.
1 heure plus tard, le résultat n’est pas concluant. Beaucoup ont fermé leur porte suite à la pandémie, l’offre est si limitée que le prix pour une chambre privée frôle les 20€ (oui, pour vous en France, ce n’est pas grand chose, mais rapporté à notre budget dans ce pays..). Nous nous rabattons sur notre première option à 100 BS (15$). Le lieu est joli mais les chambres laissent à désirer ainsi que l’accueil du personnel. Nous recommandons cependant Eucalyptus Potosi, juste ce qu’il faut pour être confort.
Il y a deux terminaux de bus à Potosi. L’ancien, assez proche du centre ville, et le nouveau, un peu plus en périphérie mais bien plus grand. Les taxis vous coûteront maximum 5 BOB par personne.
Visiter Potosi, c’est un peu comme manger un fondant au chocolat. A l’extérieur, dense, pollué et bruyante, où parpaings à nu et toits en tôle servent de maisons aux habitants de l’ancienne plus grande ville du monde au 18ème siècle. Dans le centre, les bâtiments racontent une autre histoire. Celle d’une ville parmi les plus fastueuses de son époque où quelques somptueux bâtiments coloniaux viennent rappeler les richesses pillées par l’Empire espagnol.
La ville aux superlatifs
Au XVIIIème, Potosi est à son apogée. C’est une des plus grandes villes du monde avec ses 200 000 habitants et l’une des plus prospères. On pourrait même dire qu’elle est parmi les plus importantes et on comprend facilement pourquoi : tout est une histoire d’argent. La prospérité financière de l’Empire Espagnol dépend de l’activité minière de la région.
Aujourd’hui, ces superlatifs ont été relégués au passé. Potosi conserve cependant le titre de ville la plus haute du monde, postée à 4070 mètres d’altitude, ainsi que le surnom “la mangeuse d’hommes”, qui en dit long sur le bilan humain des activités dans les mines.
Sujet plus réjouissant, l’anniversaire de Marion dont la quête d’un bar sympathique nous a fait une petite visite du charmant centre ville de Potosi !
Si les belles façades de la Plaza Principale, les nombreuses églises et les balcons en bois des rues adjacentes nous ont presque fait regretter de ne pas rester plus longtemps, c’est dans la Calle Padilla et la Calle Junin que nous avons trouvé nos activités nocturnes. En quelques heures seulement, c’était court mais intense !
Space Invader à Potosi ? Improbable
Eh bien oui, le célèbre artiste de Street Art Invader à coller ses mosaïques aliens un peu partout dans le monde ! Aussi fou que cela puisse paraître il y en a une à Potosi.
Le plus dingue ? Ce n’est pas un cas isolé en Amérique du Sud. Une carte collaborative en ligne recense les oeuvres de l’artiste. Vous pouvez les localiser et les collectionner. Une chasse à l’échelle mondiale ! Il y en a même deux dans l’espace.
Comment aller à Potosi ?
L’avantage de Potosi, c’est que c’est à mi-chemin entre la ville de Sucre et le départ des expéditions pour le Salar de Uyuni. Idéal pour couper la route à l’aller ou au retour.
- Sucre – Potosi : 3h30 depuis le nouveau terminal pour 20 BOB;
- Tupiza – Potosi : 6h depuis le nouveau terminal à partir de 80 BOB;
- Uyuni – Potosi : 4h depuis l’ancien terminal pour 40 BOB;
- La Paz – Potosi : 9h pour le nouveau terminal à partir de 100 BOB.
⛏ Comment visiter les mines d’argent de Potosi et quelle agence ?
Les mines d’argent de Potosi ne se visitent pas seul, vous entrez quand même dans une zone minière en activités.
Cette activité n’est pas sans risque et on vous conseille de passer par une agence qui s’occupera du transport, du prêt de matériel et d’un guide passionnant, souvent ancien minier lui-même. Et mieux vaut connaître son chemin lorsqu’on commence à s’enfoncer dans la montagne.
Nous avons fait appel au service de l’agence Marco Polo Tours. Willy, notre guide, a longtemps travaillé dans les mines comme presque toute sa famille. En plus de s’exprimer dans un français parfait, il nous conte son histoire et celle des mines de Potosi.
Durée de la visite des mines d’argent de Potosi avec l’agence Marco Polo Tour : 3 heures pour 70 BOB (9€) par personne. Nous étions un groupe de 4.
📖 Un peu de contexte avant de commencer cette visite
Willy stoppe le mini-van sur une esplanade à quelques encablures de la place principale. Un endroit qui, en plus de nous donner un premier aperçu du Cerro Rico, témoigne de la vie des peuples originels venus travailler dans les mines. Loin du centre coloré occupé par les Espagnols, on est dans des rues étroites et pentues où des maisonnettes de plain-pieds et pas moins de 42 églises ont élu domicile.
À des fins d’évangélisation, l’Église cherche à faire dans le marketing de proximité. Les différentes communautés sont regroupées entre elles afin de proposer une évangélisation ciblée selon les références de chacun, comme nous l’avions déjà vu à Cusco.
Got an extra day in Medellin? Consider visiting the nearby village of Guatape, home to a mammoth 10-million-tonne rock. You can climb the 675 zig-zagging steps to the top, where you’ll find panoramic views over the surrounding countryside and lakes below.
Quel métal est extrait des mines de Potosí ?
Le Cerro Rico est une montagne composée de minerai d’argent. A son sommet, les veines argentifères rappellent le métal qui a fait la gloire de la ville.
Pendant 4 siècles, 30 000 tonnes d’argent ont été extraites des entrailles de la montagne. Une telle quantité, que le Cerro Rico est le deuxième plus gros gisement d’argent au monde.
Aujourd’hui, la montagne a “tout donné” comme dirait Gims. Les filons d’argent se font rares, ne restent que du zinc et de l’étain. Toujours en activité, le cerro fournit toujours beaucoup d’emplois à la ville minière de Potosi. Cela en fait le site minier en fonctionnement le plus ancien au monde.
Utilisation des mines d’argent de Potosi
L’exploitation des mines de Potosi a servi, au 16 et 17ème siècle, à l’enrichissement de la couronne d’Espagne et par ricochet à celui de l’Europe. L’argent récupéré par l’Espagne approvisionne le stock de monnaie en Europe, la base de tous les échanges internationaux. Pas fou, ce n’est pas injecté de bon cœur mais bel et bien en échange de fournitures provenant des pays voisins. Ce besoin présent “d’écouler” l’argent pénalise lourdement la production locale et entraîne une grosse inflation en Espagne. Une situation qui l’affaiblit à la sortie du Siècle d’or tandis que les autres États développent leur industrie.
Comment reconnaître le Cerro Rico de nuit ? C’est la seule montagne parsemée de petites lumières le long de ses flancs. Facile à repérer !
La route de l’argent
Potosi, à son apogée, produit la moitié de l’argent mondial et presque la totalité de l’exportation espagnole, avec le Mexique. La Casa de la Moneda à Potosi était chargée de transformer le minerai brut en pièces sonnantes et trébuchantes à destination de l’Espagne.
Pour améliorer la qualité de l’argent, il faut le mélanger avec le double de volume de mercure. Un autre métal extrait des mines de Huancavelica au nord-ouest de Potosi qui prend naturellement sa place dans la route de l’argent en Amérique du Sud.
Le chargement est transporté le long de l’Empire Espagnol jusqu’au Panama pour finir à Carthagène-des-Indes, premier port construit à l’arrivée des Conquistadors. La flotte des Indes, financés en partie par l’argent exporté, prend ensuite le relais pour remplir les caisses d’Espagne.
Histoire des mines d’argent de Potosi
Les mines d’argent de Potosi étaient déjà exploitées par les natifs bien avant les conquistadors. L’arrivée de ces derniers n’a fait qu’intensifier l’activité jusqu’à la surexploitation. Cela provoque un affaissement de 100 mètres de la montagne.
Vous vous en doutez, ce ne sont pas les Espagnols qui entraient dans les ouïes armés d’une pioche et d’une lampe à acétylène. Les peuples originels étaient prédisposés à l’emploi puisqu’ils avaient déjà l’expérience nécessaire.
Un peu réticent à l’idée, la mita est restaurée afin d’imposer le travail obligatoire. D’origine Inca, c’est un système de rotation qui oblige un homme valide à mettre la main à la pâte de temps à autre à titre gracieux pour des tâches d’intérêt général. Wikipédia fait le parallèle avec “la corvée seigneuriale”. Endurci par les conquistadors, ce “tribut” rassemble chaque années de plus en plus de natifs assurant une main d’œuvre bon marché à la couronne.
Qui a découvert les mines d’argent de Potosi ?
Comme mentionné dans le paragraphe précédent, la découverte des richesses du Cerro Rico revient aux natifs. Cependant, la rencontre accidentelle du Quechua Diego Huallpa avec une veine d’argent changera la donne. Il y a d’ailleurs deux versions de l’histoire.
Voici la première. Au début, il n’en parle à personne et commence son petit commerce. Une nuit arrosée de chicha le poussera à s’en vanter auprès d’un de ses collègues. La nouvelle arrive ensuite aux oreilles de son maître Juan de Villarroel, un conquistador sans scrupule. Dans la deuxième version, ils le font entre collègues. Malheureusement, c’est l’embrouille et le petit Quechua Huallpa demande de l’aide à son maître l’espagnol. Il demande alors qu’on l’emmène là bas et la… C’est le loup qui rentre dans la bergerie.
La légende raconte que Diego était à la recherche d’un de ses lamas. Le soir, il alluma un feu sur la colline et le lendemain matin, des restes du feu émergeaient une veine d’argent.
Halte au marché des mineurs
Beaucoup d’explications d’un seul coup non ? Cela nous semble important de bien comprendre en quoi les mines de Potosi jouent un rôle capital et ont permis le développement de la ville.
Il est maintenant temps d’allumer sa lumière et d’ent.. Quelqu’un a vu ma frontale ? Vous n’en avez pas ? Cela tombe bien, vous trouverez tout ce dont vous avez besoin au marché des mineurs, notre second arrêt.
Alcool à 90 (et ça ne sert pas à désinfecter des bobos), feuilles de coca, cigarettes, gâteaux, soda ou dynamites, il est commun d’acheter quelques “regalos” à donner aux mineurs qu’on croisera dans les tunnels. Le sac est vendu entre 20 et 30 BOB. Une pause adéquate pour aussi comprendre le fonctionnement d’un détonateur muni de son bâton d’explosif. Willy nous a expliqué les rudiments. “Le plus chère c’est la mèche. On la coupe court comme ça [..] ça nous laisse environ 30 secondes pour courir plié en deux se mettre à l’abri.”
Rudimentaire et peu rassurant quant aux conditions de sécurité. Chaque explosion met la vie du mineur et de tous ceux qui travaillent dans les tunnels supérieurs ou inférieurs en danger.
👿 Visiter les mines d’argent de Potosi : notre expérience dans l’antre du diable
L’équipement du mineur
S’engouffrer dans ce géant de 4830 mètres de haut nécessite de s’équiper en conséquence. Nous enfilons le pantalon et la veste à manche longue que Willy nous tend. Une paire de bottes, un casque et une frontale viennent compléter la panoplie ! Nous voilà prêt à affronter les sombres cavités humides de ce labyrinthe infernal.
L’équipement caractérise l’expérience et le métier de son propriétaire. Les débutants commencent par pousser des chariots de plusieurs centaines de kilos en sandales. Puis petit à petit, force de petits services rendus et d’intense efforts, ils acquièrent bottes, casque et évoluent dans la hiérarchie des mineurs. La position la plus élevée est le foreur qui est chargé d’agrandir les voies avec une machine pneumatique.
L’usage de protection contre les particules, la poussière ou les gazs nocifs ne fait pas partie de l’équipement. Parfois un foulard tout au plus.
L’entrée
Nous troquons quelques confiseries contre un bonjour de la famille en charge de la garde des lieux. Au loin, nous apercevons les premiers rails et wagons déchargés en fin de voie. L’air est sec, chaque mouvement soulève la poussière qui reste en suspension avant de retomber. Un peu partout siègent des tas de cailloux éparpillés. Chargement ou résidu ?
Nous approchons d’une des 200 entrées de la mine. La montagne est littéralement trouée de toutes parts par des cavités. Certaines sont abandonnées. L’encadrement de la porte est légèrement rougit. Willy nous explique qu’un lama a été sacrifié et que son sang a servi pour protéger la mine et les personnes qui y entrent.
Le portail franchit, les ténèbres s’enlacent autour de nous. Mieux vaut ne pas s’attarder sur l’état de la structure supposée assurer la sécurité du passage.
Descente dans les entrailles
Dès le début et malgré un masque chirurgical, l’odeur de soufre et de poudre nous monte aux narines rapidement.
La lumière blanche qui marque notre point d’entrée se fait de plus en plus petite. Il fait sombre, humide et l’air est chargé en particules. Seules les gouttelettes qui s’écrasent au sol accompagnent le bruit de nos pas et le cliquetis de notre lampe.
“Attention la tête” s’entête à dire Willy au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans le tunnel en marchant minutieusement entre les rails.
BAM. Une petite excroissance sur la route et c’est le casque de mimi qui rencontre la roche en premier. Être grand n’est vraiment pas un avantage dans cette visite. Il faudra à partir de maintenant faire l’effort de baisser la tête tout en avançant dans un mélange de boue et de pierres.
Comme si cela ne suffisait pas, notre guide nous signale que ce couloir peut contenir quelques résidus de gaz nocifs. Nous allons donc courir plié en deux tout en retenant notre souffle. Équipés de nos grosses bottes en caoutchouc, difficile de challenger le record d’Usain Bolt au 100 mètres. Nous sortons finalement de la zone à risque. Précaution ou sensationnalisme, on ne saurait dire.
Attention la tête
700 km de tunnels et 1000 mètres de profondeur. Un labyrinthe en 3 dimensions qu’on apprend à connaître dès le plus jeune âge. Droite. Nous retenons la direction pensant pouvoir retenir notre chemin en cas de pépin. Gauche. “Attention la tête”. Droite. “Serrez à gauche”. A droite, un trou d’aération et une échelle en bois menant au niveau inférieur. On passe la tête et apercevons une percée au travers d’une dizaine d’étages. Droite. Nous sommes perdus et comptons intégralement sur Willy pour le chemin du retour.
Des mineurs au pas déterminés nous doublent une grosse boule de feuilles de coca coincée entre la joue et les molaires. Il n’y avait pas grand monde dans la mine ce jour-là. Quelques chariots vides traînent par ci par là. Le tout peut peser des centaines de kilos. Le but est de lui donner une inertie suffisante pour arriver à la sortie. Un virage raté et l’accident peut être fatal. Soudain un grondement lointain rompt le silence pesant qui s’était emparé des lieux. “De la dynamite. Quelqu’un a dû repérer un filon”.
Les mineurs décident par eux même quelles voies ils veulent explorer. Ils sont généralement par équipe de deux, question de sécurité en cas d’éboulement ou de fuites de gaz.
La température a encore grimpé, l’air est étouffant et nos frontales sont à peine suffisantes pour nous offrir un éclairage décent. Nous nous attardons quelques instants sur un maigre filon d’argent accompagnés d’explications sur comment le travailler et savoir dans quelle direction il va.
Visite à Lui
Nous allons le rencontrer. Il est là, au bout de cette alvéole sans issue. Une inscription “Tio” indique la direction. On perçoit une légère odeur de tabac. Qui est-il ?
Tantôt appelé le Malin, tantôt démon, le diable se prénomme à Potosi “El Tio”, l’esprit protecteur de la mine. Ce concept doit chambouler quelques esprits catholiques ! Propriétaire de la montagne, il n’aime pas être laissé seul sans quoi il erre dans les tunnels et déclenche des accidents pour s’occuper. Les mineurs viennent donc lui rendre visite pour partager une guinze, quelques feuilles de coca ou un peu d’alcool.
Assis de part et d’autre del Tio, Willy nous raconte son histoire dans la mine et celle de sa famille qui l’exploite depuis des générations.
Difficile de ne pas souligner le sacré calibre du lingam del Tio (ndlr penis) ni la cigarette encore fumante qui pendouille entre ses lèvres noircies par une consommation excessive de tabac. Installé douillettement sur son lit de feuilles de coca, nous éteignons nos lumières pour ne pas le brusquer et écouter les légendes qui accompagnent les mineurs dans les pénombres.
Qui aurait cru que rendre visite au Diable pouvait être agréable ?
Ps : nous n’avons pas hésité à lui confier le reste de notre stock de feuilles de coca ainsi qu’une petite cigarette. Mieux vaut l’avoir dans notre équipe que contre nous !
Sortie, Salud et Salaire
Nos yeux se sont à peine habitués à la pénombre, à l’odeur de la poudre et du soufre que, sans nous en rendre compte, la boucle est bouclée. Nous voyons la lumière au bout du tunnel.
La poussière nous salue chaleureusement à notre retour. Quelques mineurs titubent, surement quelques coups dans le nez. Les acheteurs sont venus pour tester le minerai et négocier le tarif au kilo . Offrir quelques bières reste le meilleur moyen pour obtenir des prix avantageux. Salud, qui signifie à la fois “trinquer” et “santé” en espagnol, voit ses deux notions étroitement liées.
Parler salaire c’est tabou. Difficile d’estimer la paie journalière d’un mineur. Le blog Instinct Voyageur cite entre “entre 2000 et 2500 bolivianos par mois. Alors que le salaire minimum est de 800 bolivianos.”. Une partie repart à la coopérative et est investi du matériel. Dans tous les cas, c’est bien trop peu en comparaison des risques et des conséquences sur la santé liés à cette activité.
La montagne Mangeuse d’Hommes
L’espérance de vie d’un mineur ne dépasse pas 45 ans. Aujourd’hui en 2022 c’est une réalité. Un ancien mineur a un jour dit que les conditions de travail étaient celles du nord de la France mais il y a 100 ans !
La silicose, une maladie respiratoire causée par la poussière de silice, empoisonne chaque jour un peu plus les poumons des 35000 ouvriers. Elle finira par les emporter si une fuite de gaz, une chute ou un éboulement n’a pas déjà terminé le travail. Du groupe d’amis de jeunesse de Willy, il est le dernier encore en vie. Sa voix en dit long sur cette tragédie mais retranscrit une certaine fatalité sur ce qui est devenu normal.
Si partir à la mine avec son père dès le plus jeune âge semble révolu, le travail des enfants est toujours plus ou moins présent. Avec cette statistique terrifiante sur l’espérance de vie, le Cerro Rico qui porte bien son nom de “Mangeuse d’hommes”. 3 millions d’esprits amérindien porteraient compagnie à “El Tio” dans la montagne tandis que 2 millions d’Africains auraient perdu la vie avec le traitement de la roche.
Un quotidien qui défie chaque jour les limites de la montagne, et des hommes.
Existe-t-il des femmes mineures ?
Et la place des femmes dans tout ça ? Si les mineurs restent très superstitieux sur la présence féminine, leur présence dans les mines se démocratise. Il y a quelques années, il aurait été impensable d’Elisa et Marion y rentre. En effet, il est communément admis que l’on porterait malheur.
Elles sont aussi des gardes fou. Lors de la vente des récoltes, elles rejoignent leur mari et repartent avec une partie du solde afin d’éviter que ce dernier ne dilapide tout dans l’alcool.
La légende raconte que Diego était à la recherche d’un de ses lamas. Le soir, il alluma un feu sur la colline et le lendemain matin, des restes du feu émergeaient une veine d’argent.
🧠 Tourisme de misère ou expérience authentique : notre avis pour conclure
Les voyageurs réfléchissent à deux fois avant de se lancer dans la visite des mines d’argent de Potosi. Voyeurisme pour certains, tourisme de misère ou sensationnalisme pour d’autres, on ressent un certain malaise d’être témoin de ces conditions de travail. De plus, il ne faut pas être claustrophobe, inutile de préciser qu’on s’aventure dans un univers clos et très sombre.
Pour nous, ce fut une expérience très instructive grâce à notre guide Willy. Son discours a vraiment apporté du corps et du sens au circuit dans la mine. Nous avons choisi de faire cette activité avec pour état d’esprit d’apprendre et se confronter à cette réalité. Sans pour autant se vanter d’en être ressorti plus sage, c’est éclairés sur l’Histoire bolivienne d’hier et d’aujourd’hui que nous continuons notre route.
Par signe de respect aux innombrables vies enfermées à jamais dans les limbes de la montagne du diable, nous n’avons pas joué avec la dynamite. De toute manière, on ne nous l’a pas proposé.
Peut être avez besoin d’un second avis avant de vous lancer dans l’aventure ? Nous vous invitons à découvrir deux articles complémentaires très bien écrits. L’un raconte l’expérience de Sébastien pour GEO qui a lui aussi visité les mines de Potosi il y a quelques années. Le deuxième est un extrait du livre de Gary Lawrence sur le voyage.
On espère que cette Mimistoire vous aura donné envie d’aller visiter les mines de Potosi. Plus qu’une “activité” c’est aussi une reconnaissance de cette histoire coloniale (dont nous partageons la responsabilité) mais aussi de l’histoire contemporaine. L’exploitation minière est souvent très difficile aux quatres coins du globe et cela pose la question de pour qui ces personnes le font, dans quelles conditions.
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